Entretien avec Rachelle Agbossou

©Césaire Dakpogan
 De l'enfance à la danse
"Quand j’étais petite, je dansais, je faisais des concours de danse avec mon frère, c'est mon papa qui nous entrainait. À la maison, on dansait beaucoup. Et il nous faisait sortir de temps en temps pour nous apprendre comment faire des pas de salsa, comment danser le zouk... Mon grand frère et moi nous participions à beaucoup de concours de danse surtout les danses urbaines, les danses de Côte d'Ivoire, les danses d'ici, les danses du Congo, le Ndombolo... A côté, on continuait à aller à l’école normalement. Je ne peux pas dire que c'était prémédité. Je ne savais pas à l'avance que j'allais devenir danseuse. Ce n'est d'ailleurs pas le rêve des parents pour leurs enfants. Mais, déjà quand j'allais à l'école, j'étais dans les groupes de théâtre, dans les groupes de danse, mais au départ juste pour m'amuser ! Puis, j’ai continué de danser à l’université avec l'Ensemble Artistique et Culturel des Étudiants. C'est là que j'ai véritablement commencé à faire de la danse en groupe. En 2000, je passais ma maîtrise en anglais et on est venu me demander si je voulais renter au Ballet National du Bénin. J’ai d'abord refusé, parce que je devais terminer mes examens. Puis lorsque j'ai été reçue, je me suis dit : "Tiens pourquoi ne pas les rappeler pour savoir si c'est encore possible ?" Pendant les quatre ans qui ont suivis j’ai appris à faire la plupart des danses traditionnelles du Bénin. Au Ballet National on ne peut pas y échapper, on es obligé de les connaître parce que du matin jusqu’au soir, on ne fait que ça ! Donc voilà, c'est comme ça que ça a commencé. La danse qui m'a amenée à elle. Je suis partie comme ça, sans savoir où est-ce qu'elle allait me faire atterrir !"

Le corps comme un jeu
"J'ai commencé à faire de la danse contemporaine avec le groupe Sacam. Ça a été un déclic. J'avais certaines aptitudes physiques. J'ai trouvé l'expérience intéressante, on explore tout le corps et moi j'aime ça. J'ai compris que je pouvais aller beaucoup plus loin qu'avec la danse traditionnelle. La danse traditionnelle quand le tam-tam dit ça il faut faire tel pas. Par contre, avec la danse contemporaine, ou la danse de création, le tam-tam peut dire ça et toi tu fais autre chose. Moi, j'aime les explorations, j'aime les changements, j'aime ce qui est nouveau, quand il faut faire des recherches, quand il faut créer des choses. C'est pour ça que j'ai continué dans ce sens là, c'est toujours bien d'avoir le regard un peu plus loin."
"En 2004, j’ai intégré la Compagnie d'Heddy Maalem, il a développé un travail sur le centre du corps, comment se poser, comment se tenir debout en équilibre, comment utiliser le centre du corps pour bouger d'un endroit à l'autre. Aujourd'hui, je travaille avec ça. Le corps du danseur est très important dans le processus de création. Tu as beau penser quelque chose, dire que tu veux aller dans ce sens là, le corps du danseur peut te proposer autre chose. Et c'est l'ensemble qui détermine le résultat."

Au rythme de la tradition
"Dans mon processus de création, la danse traditionnelle à une place très importante. Si j'élimine les danses traditionnelles, je partirai de quoi ? Je n'aurai rien, aucune base, aucun préalable pour avancer. Si je veux faire de la création qui dénote, il faut bien qu’il y ait des choses identitaires. Pour moi la danse traditionnelle est primordiale. J'aime le Zinli, parce que ça fait travailler tout le corps, des cheveux jusqu'aux orteils. Avec cette danse, on a des milliers de possibilités. Dans mes créations, il y a toujours ce mélange danse traditionnelle/danse contemporaine."

La formation
En 2005, j’ai pensé qu'il serait bien que je fasse quelque chose dans mon pays, parce qu'on travaillait entre amis mais, il n'y avait pas de véritable formation donc je me suis dit pourquoi ne pas chercher des voies et moyens pour former des jeunes danseurs à la danse de création, à la danse contemporaine ? J'ai donc créé ma propre compagnie : la Compagnie Walô. On intervient beaucoup dans les écoles. Ça éveille les enfants, ça change leur façon de voir même ce que leur enseigne les instituteurs. C'est une assez belle expérience. La danse, peut éveiller la conscience des enfants."

©Céline Coyac

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