Dansons Maintenant : Souvenirs de Christine Bastin...



Soirs d’avril à Cotonou
Je n’étais jamais allée en Afrique …jusqu’à ce jour où j’arrive à Cotonou au Bénin… pour danser ! Invitée à danser en Afrique ! Pour moi qui vibre à chaque évocation de la faille du Rif, ce berceau supposé de l’humanité, c’était précieux, important, impressionnant de se rapprocher de là où tout a commencé : nos premiers pas, nos premiers cris, nos premières joies …
Et ce plaisir immense quand je découvre les photos d’Antoine Tempé qui seront le fil rouge de ma danse : …des corps, des forces, des éclats de fête, des intensités stupéfiantes, du rouge, du blanc, du noir, de l’insolence, de l’exubérance…. La danse de l’Afrique d’aujourd’hui toute en peau, en émotion, en vie urgente et débordante, hommes et femmes puissants l’un devant l’autre…
Alors voilà, pour répondre à la détonation blanche et noire de ce paysage photographique, j’ai imaginé une île rouge de roses, où le blanc explose, où le blanc se fend d’un goût de femmes.
Céline, Mélodie, Christine, dansées par le vent, au milieu du Champ de foire, reçues, accueillies, soulevées par un public qui  entrait de plein fouet dans notre vivant, notre essentiel ….
Quelle leçon pour moi, le soir du premier spectacle, où j’ai cru que ma danse devenait invisible parce que des problèmes techniques bouleversaient son ordonnancement réglé, millimétré !… Parce que la technique m’échappait, il me semblait ne donner à voir que du chaos…Femme de bien peu de foi ! Le public avait  déjà capté,  il se réjouissait tandis que j’étais seule à m’affoler… Seule.  
J’oubliais  que ce qui est "est"… la présence dans l’acceptation de l’imperfection… vaut bien mieux que l’attachement obstiné à ce qui de toutes façons m’échappe. … écouter ce qui est, n’est-ce pas ça danser ? Le vivant justement, juste avant qu’il ne meurt de trop s’organiser…
Le Bénin m’a touché en cela que tout émerge là tout de suite, en voix, en couleurs, en corps…tout vit intensément. Je suis portée par les yeux gourmands des enfants, leurs pieds-chevaux, leurs mains-oiseaux. Et leur curiosité dévorante à la Fondation, ce lieu de haute culture qui veut pour eux le meilleur et peu importe qu’ils aient ou pas de manteaux… Le beau, pour tous. C’est urgent.  
Cette fondation est lieu rayonnant, nourrissant, vital. .. En cet endroit d’Afrique, où encore trop de gens ont trop peu,  il y a vous,  comme un lieu-sel…
Céline, Mirabelle, Carlos, Mohamed, Stéphane, Aurélie, Marie-Cécile et le sorcier de la pluie… merci à vous de nous avoir invitées, nourries, conduites, accompagnées, protégées, regardées, enrichies…
De Cotonou, je suis revenue détendue et dansante et confiante... Le Bénin n’est pas un souvenir, il est présent.
Christine Bastin

©Céline Coyac
©Céline Coyac

Commentaires