La formation du danseur africain

©Delphine Chevalme

La place de lenseignement est importante dans cette 3ème édition. En effet, un grand nombre dateliers pour danseurs professionnels, pour amateurs et pour enfants ont été installés et sont animés par dexcellents pédagogues africains. Cest bien le signe de limportance que la Fondation Zinsou accorde à la transmission des savoirs. 
En France, le métier denseignant a été longtemps déprécié. Dans les années 1970-1980, peu de danseurs formés ont réellement choisi denseigner. Les mondes de la création, de lenseignement et de la recherche, malgré des initiatives plus quintéressantes, sont très éloignés. Il nest pas étonnant que les structures françaises, qui invitaient les artistes, exerçaient de temps à autre des pressions dissimulées afin quils fassent de la sensibilisation en ­échange de moyens pour faire une pièce. Enseigner est un vrai métier. Penser la transmission des savoirs exclut tout amateurisme. Cela est particulièrement vrai en Afrique. 
Une interrogation est celle de la formation des enseignants en danse africaine. Afin dexclure le dilettantisme de lenseignement par les danseurs africains, ne faut-il pas leur enseigner à enseigner ? Peu de formations en danse en Afrique sintéressent à cet aspect. La difficulté de vivre de son métier en Afrique devrait encourager ce type de formations à lenseignement. LEcole des Sables, par lenseignement de la technique de Germaine Acogny à une douzaine de danseurs diplômés, tente dy répondre. Il faudrait mettre en place une formation à lenseignement de la danse. Là encore, l’École des Sables y travaille.
Lapprentissage technique permet au danseur de faire de la danse à partir de nimporte quel matériau. Doit-on penser en ces termes quil existe une technique classique, contemporaine, jazz, hip hop ou africaine ? Mais encore faut-il être capable de faire des choix. La formation du danseur africain devrait être capable daider le danseur à faire ses choix, à inventer ses propres moyens de training en fonction de ses objectifs et projets artistiques, de lui permettre dacquérir des outils physiques et intellectuels afin de ne pas uniquement subir sa formation et de pouvoir construire du sens.

©Karine Maincent

Pourquoi continuer à former des danseurs incapables dinventer leur emploi dans leur propre pays ? Après tout, en faisant le choix de la danse, les artistes nignorent pas les risquent quils prennent. Il ne sagit pas de former des artistes à savoir tout faire, mais des gens avec des idées et conscients de ce quils veulent réellement achever sur scène ou ailleurs.
Le futur de la danse en Afrique dépendra de la formation des danseurs africains.
Il est vrai que les gouvernants africains ne sintéressent guère à la danse africaine sauf à de rares exceptions. Les contributions pour soutenir la formation du danseur proviennent des pays étrangers et non des pays africains. Aujourdhui, malheureusement, il semble que la priorité est daccompagner l’émergence artistique et laccès des jeunes artistes à de nouveaux circuits de diffusion, de soutenir les festivals et manifestations qui permettent la circulation des œuvres, de les montrer sur le continent et dappuyer quelques créations.

©Delphine Chevalme

On ne peut pas dire que le continent déborde de formations de qualités. Arrêter la formation, cest condamner la jeune danse africaine et les jeunes danseurs à ne pouvoir émerger. Les formations sont non seulement des espaces de savoirs, mais également des espaces de rencontres et de développement de réseaux. Il est en somme souhaitable que davantage defforts et de soutiens soient mis sur la formation du danseur africain pour une danse dexcellence.  

Patrick Acogny

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