SERPENT DE VIE

©Sophie Négrier

Dessiner les corps, les forger, les façonner pour en extraire la plus
belle des élégances.
Construire un groupe autour d'une même technique et les faire avancer
ensemble pour que chacun puisse repartir de son côté, plus riche
encore qu'avant son arrivée.

" Il faut élever les enfants pour les laisser partir "
La technique Acogny continuera d'exister au travers du corps de ses
danseurs qui transmettront peut-être à leur tour un jour.

Danser pour évoluer, évoluer pour avancer, avancer pour s'émanciper et
construire plus grand, plus loin, plus libre.
Germaine Acogny a, c'est certain, contribué au développement de l'Afrique.

Sa technique, d'une précision redoutable, polit les corps et les
esprits au profit du développement personnel de chacun des danseurs.

A l'instar de la technique Irène Popard, qui fit partie de la
formation de Germaine Acogny, sa technique comporte une terminologie
très imagée. Chaque pas, chaque mouvement est doté d'un nom. Prendre
un atelier avec Germaine, c'est voyager au coeur d'un univers poétique
résolument africain.
"Le cocher, la passagère, le Soleil, la Lune, piler, écraser...
La colonne vertébrale est un serpent de vie..."
Pendant chacune des trois heures de ses ateliers, les images se
succèdent, permettant au danseur d'appréhender plus facilement la
spécificité, l'intention de chaque mouvement.

"Soyez toujours fier de ce que vous êtes ! Qui que vous soyez, blancs,
nègres, soyez fiers !"

Maman Germaine, dont la détermination et la grâce n'ont d'égales que
sa féminité et sa force, est directe et l'assume. Tout comme la
technique qui porte son nom, elle est intègre et singulière, unique et
universelle.

Chacun peut trouver ce qu'il a à chercher en la côtoyant.

"C'est le dernier jour, vous n'allez pas m'oublier !", dit-elle en
taquinant ses étudiants pendant la restitution qui s'est donnée hier
au centre chorégraphique Multicorps.

Non, je ne vous oublierai pas Germaine. J'ai beaucoup appris en
observant les quatre ateliers que vous avez donnés cette semaine,
peut-être encore plus que si j'y avais physiquement participer.
Je pense que pour n'importe quel danseur qui dans son parcours croise
cette technique, il y a un avant et un après Germaine Acogny.

Maman Germaine, en quelques heures, vous m'avez fait redécouvrir un
essentiel que j'étais presque en train d'oublier. Comme Pina Bausch
aimait à le dire, vous m'avez rappelée "Dansez, dansez, sinon vous
êtes perdus !".

Céline

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